LNDT: @26. La Médiation Audio & Visuelle (Part-2) – À l’épreuve de cas concrets.

Michel Akrich 2021-03-13

Et plus concrètement ?

Voici un exemple concret qui explique comment je procède. Je le donne dans cet article, non pas pour être modélisant mais pour vous inviter à créer le votre, car le sur-mesure dans ce style d’intervention est de rigueur.

Le contexte:

Le commanditaire, responsable d’une entreprise d’aide à domicile,  constate qu’il a un grave problème de communication et de compréhension avec une de ses équipes. Sa demande est, je cite: “Que j’aide l’équipe à exprimer son problème et à trouver la solution adéquate pour le dépasser”.

Je constate à force d’échanges que le besoin non exprimé est un besoin de reconnaissance de l’équipe.

Il se trouve que dans mon film “MÉTAMORPHOSE, LA PUISSANCE DE TOUS LES POSSIBLES”, il existe une séquence qui traite de ce sujet. Exceptionnellement, je propose de la montrer à l’équipe pour qu’elle observe comment il est abordé par d’autres.

La séquence utilisée de Métamorphose, débute à 30’30’’ et se termine à 41’33’’ dans la version 52’:

Dans cette séquence, les spectateurs sont face à une insatisfaction importante de la part de tous les membres d’une équipe suite à la mise en place, dans la structure, du concept managériale: les équipes autonomes. Deux personnes osent le dénoncer plus que toutes les autres et il se trouve qu’elles sont aussi les deux auxiliaires de vie les plus investies dans le projet d’autonomie.

Antoine est le responsable de la structure. Il est aussi l’initiateur de ce nouveau concept de management qui déstabilise l’organisation interne.

Dans  la séquence choisie, Antoine se trouve seul devant cette équipe mécontente d’auxiliaires de vie.

Cette expression d’insatisfaction a de fortes répercussions au sein même de l’équipe administrative. Elle se sent coupable de ne pas avoir su accompagner cette équipe sur le chemin de leur autonomie.

1 – Diffusion de l’extrait du film (durée: 11’33’’) –

2 – Après le visionnage:

Après la diffusion de cet extrait, la parole est libre. J’accueille et note sur le paperboard les réactions de l’équipe.

Pour faciliter les échanges, je peux aussi, après un temps silencieux, interroger l’équipe sur les raisons de ce silence.  Puis continuer:

  • Quelle analyse faites vous de la situation ?
  • Que comprenez-vous ?
  • Etes-vous d’accord avec l’analyse qui en est faite par l’équipe encadrante ?
  • Avez-vous un avis différent et si oui quel est-il ?
  • Que se passe-t-il pour vous dans cet échange ?

Je note chaque réaction et propos sur paper-board pour laisser une trace et l’utiliser plus tard.

Le mot “reconnaissance” émerge alors. J’interroge l’équipe sur ce qu’elle sait de la notion de reconnaissance au travail: “La reconnaissance: qu’est ce que c’est et à quoi cela peut-il servir ?”.

3 – Je donne quelques précisions après avoir écouté les propos de l’équipe: 

En tant qu’être humain, nous avons des besoins à tous les niveaux: physique, relationnel, psychique et émotionnel. Parmi tous ces besoins, deux prédominent, ils sont mêmes indispensables. Savez vous lesquels ? Le besoin d’être aimé et le besoin d’être reconnu. Ils sont aussi essentiels que notre besoin de manger chaque jour. L’absence de reconnaissance a des conséquences délétères sur nos relations avec les autres, sur la dynamique de groupe. Reconnaître une personne est un art trop peu connu. Tout manager efficient et tout patron devraient être à l’aise dans cet art de la reconnaissance. Cela fait partie d’une compétence de base du management. C’est probablement le levier le plus puissant de la structure. “

4 –  Enfin, quand la parole devient vraiment rare, je propose une suite  d’exercices :

Exercice @1

En petits groupes, je vous invite à donner une réponse aux questions suivantes (liste non exhaustive).

La restitution se fera en groupe entier.

  • À quand remonte la dernière parole de reconnaissance que j’ai reçue ?
  • De qui était-elle ?
  • Quel en était le contexte ?
  • Avais-je conscience des qualités et des valeurs personnelles que la personne me reconnaissait ?
  • En ai-je découvert de nouvelles ?
  • Quand je reçois une telle reconnaissance, que se passe-t-il en moi ?
  • Que se passe-t-il pour lui ?
  • Que se passe-t-il pour notre relation ?
  • A quel constat cela m’amène-t-il ?

J’écoute et écrit sur paper-board les feed-back de l’équipe.

Je fais une synthèse des retours au groupe et leur demande s’il y a des choses à rajouter  sur cet exercice-1

Exercice @2

En petits groupes, je vous invite à donner une réponse aux questions suivantes (liste non exhaustive).

La restitution se fera en groupe entier.

  • Dans mon équipe, où en suis-je de ma pratique de l’art de la reconnaissance ?
  • Est ce que je sais recevoir les compliments de mes collaborateurs ?
  • Est-ce que je sais faire des compliments à mes collaborateurs ?
  • Puis-je déterminer ce qui me retient ?
  • Que dois-je mettre en place pour être de plus en plus à l’aise avec l’art de la reconnaissance ?

J’écoute et écrit sur paper-board les feed-back de l’équipe.

Je fais une synthèse des retours au groupe et leur demande s’il y a des choses à rajouter  sur cet exercice-2

Exercice @3

Nous arrivons à la fin de cet atelier.

Je propose, au groupe entier de répondre aux questions suivantes  (liste non exhaustive).

  • Pourriez-vous me dire les conclusions et les décisions que vous prendrez pour la suite ?
  • Comment pouvez-vous agir pour vous rapprocher de la situation idéale ?
  • Que faudrait-il changer dans vos comportements individuels ?
  • Que faudrait-il changer dans vos comportements d’équipe ?

J’écoute et écrit sur paperboard les feed-back de l’équipe.

Je fais une synthèse des retours au groupe et leur demande s’il y a des choses à rajouter  sur cet exercice-3

L’apport de la MAV dans ces exercices.

La MAV apprend à se parler et à trouver des solutions aux situations professionnelles pourvoyeuses de blocages. Au cours de ces ateliers, l’équipe est amenée à prendre confiance en elle et à être le co-constructeur du dialogue et de son avenir.

Pour ma part, il est important de trouver le levier efficace qui fait sens et permet à l’équipe de se dire ce qu’elle ne s’est jamais révélé ou autorisé, dans le contexte du travail. Elle aide à mettre des mots quand ceux-là sont difficiles à cerner. Par son regard distancié et à la fois proche, elle est génératrice de réflexions, d’actions, d’initiatives car elle apporte et propose un regard différent et nouveau sur une situation vécue par le groupe au travail

En conclusion

C’est parce que l’audio et le visuel agissent si fortement sur la sensibilité et l’esprit humain, qu’ils peuvent être un levier vers la communication et le changement si nécessaire. Cette méthode aide à adopter un comportement, à décoder les relations, à interroger nos valeurs, à les faire évoluer dans leurs représentations. Ainsi elle permet le dialogue et évite les blocages.

C’est une opportunité pour créer un nouveau paradigme. Elle ouvre un champ des possibles dans tout travail d’accompagnement individuel et de groupe. « Les films les autorisent d’aborder des situations délicates », cite Fabienne Schoonheyt, responsable des animations à l’Hôpital Chêne aux Haies à Mons, puis elle continue, « Ils permettent de réfléchir à sa propre manière de gérer une situation, d’enrichir sa manière d’être à travers ce qui est montré à l’image mais aussi d’échanger son point de vue avec les autres participants/spectateurs ».

La MAV est à l’origine de cette énergie qui transforme l’inertie en mouvement. Voir le film

Michel Akrich 


Bibliographie:

  • Gary Solomon, Reel Therapy, Lebhar-Friedman Books, 2001
  • Gary Solomon, The Motion Picture Prescription, Aslan Publishing, 1995
  • Edwige Antier, Pourquoi votre enfant rêve avec Disney ?, Robert Laffont, 1976
  • Virginie Lemaire de Bressy, Cinémathérapie par les dessins animés, Ed Dangles, 2019
  • Patrice Gilly, Le cinéma, une douce thérapie, Chronique sociale, 2015
  • Gérard Bléandonu, La vidéo en thérapie : le choc de l’image de soi dans les soins psychologiques, ESF, 1986
  • Yves Bouron, L’image de soi par la vidéo : pratique de l’autoscopie, Top Ed, 1998
  • Robert Dilts, Être coach, De la recherche de la performance à l’éveil, Ed Dunod, 2018

Crédit photo : Image par Gerd Altmann de Pixabay

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