« Par un curieux hasard »

de Stephan Schillinger.

Article complété par des notes personnelles entre parenthèses de Dominique Krischel

“L’extraordinaire capacité d’adaptation de l’enfant ne lui permet pas la stagnation dans ce que nous, adultes, appelons “souffrance”.

(L’enfant par sa petite taille, sa jeunesse, son intelligence instinctive, son manque d’analyse et de recul (comment le pourrait il?), le développement de fantasmes et la pensée magique qui lui permettent de tenter d’expliquer l’inexplicable ou l’indicible ou l’impensable, sa place dans la fraterie, la volonté de survivre, le besoin d’être aimé même par des adultes même défaillants, le besoin d’être reconnu, valorisé, d’exister même un tant soit peu…. ont pour conséquence que l’enfant va s’adapter comme il peut:

* il/elle va devenir en apparence ce que les adultes veulent qu’ils deviennent,

* il va aussi somatiser pour qu’on s’occupe de lui,

* ou devenir rebelle et turbulent

* ou développer des addictions temporairement anesthésiantes

* ou se créer un “faux self” (2 personnalités = 1 apparente et 1 cachée)

* ou avoir des troubles psychologiques puis psychiatriques …

De toute manière c’est lui ou elle le “malade désigné ” porteur du symptôme familial qui maintient l’homéostasie du système familial défaillant)…

Les plus intelligents développent un côté HP qui scanne les adultes et les décodent dans leurs moindres comportements : pour survivre ils “rasent les murs”…

En apparence ils paraissent rester des enfants mais en fait ils deviennent des petits adultes, des “scanners miniatures” qui scrutent les grandes personnes pseudo adultes et développent des stratégies de survie avec tous les enfants et tous les adultes qu’ils perçoivent comme potentiellement dangereux .

Les adultes défaillants de leur entourage ont volé leur enfance et leur adolescence, ils sont devenus pseudo adultes ( = comportement d’adultes ) dans un corps d’enfant avec un manque affectif colossal.

Eux mêmes perçoivent très tôt qu’ils sont devenus différents des autres enfants, ils se sentent parfois monstrueux et terriblement seuls car ils se rendent très vite compte qu’ils ne sont que très rares les mômes, les ados puis les adultes qui ne fonctionnent que comme cela)

Cette souffrance non perçue comme telle par l’enfant prend la forme d’une adaptation instantanée, permise par une plasticité émotionnelle inégalable, que nous pourrions définir comme un réflexe de survie, et qui prendra plus tard le nom de ” traumatisme.”

Cette nouvelle posture alors acquise pour survivre à l’environnement (parents violents, dépendants, dysfonctionnels, fratrie violente etc) acquiert avec les années une double qualité : rigidité ET fusion avec le Soi.

C’est comme une armure qui, ayant pourtant permis de survivre à un environnement toxique, colle désormais à la peau, devenant sclérosante.: (un mécanisme de survie qui permet juste de survivre, pas de vivre et qui devient à la longue des années un /des mécanismes de défense de plus en plus automatiques et puis une prison répétitive.)

Le corps (physique et émotionnel) grandissant, les besoins et les désirs changeant, l’armure que sont les stratagèmes et les mécanismes d’adaptation autrefois essentiels et salvateurs, révèlent leur nature limitante.(et deviennent une prison)

(Dans l’enfance et l’adolescence) le désir de convenir, d’être à la hauteur, de combler les attentes de son environnement (parents, culture, fratrie, etc) auront supplanté notre besoin, originel et fondamental, d’authenticité et de congruence.

(A l’âge adulte) la période d’individuation, de la trentaine à la cinquantaine, quand elle n’est pas l’objet de la fuite du soi dans une carrière ou de l’accaparement total par des obligations parentales, peut alors devenir le théâtre de prises de consciences toutes particulières.

Pour la plupart d’entre nous, nous sentons bien que « quelque chose ne va plus » et ne nous correspond plus.

Pour ceux qui auront entamé le travail un peu plus tôt, nous comprendrons que “certains besoins ne sont pas remplis”.

Nous pourrons alors lister tous ces besoins et les satisfaire comme nous remplirions un vase en miettes à coup de verres d’eau.

Seule la découverte de l’abandon de notre authenticité originelle au profit de la nécessité du lien, permet la reconstitution progressive du vase, dont nous pouvons recoller les morceaux à l’aide de cet or qui découle de nos prises de conscience.”

Cette lettre, votre adolescent ne peut pas vous l’écrire. Lisez-la attentivement…

Elle n’arrivera même jamais dans votre boite mail. Mais c’est précisément ce qui rend ce courrier imaginaire aussi utile, et percutant.

Comment comprendre les émotions d’un adolescent qui se réfugie dans un silence obstiné ? Quels regards porter sur l’adolescence, cet âge que l’on dit souvent ingrat lorsque nous sommes devenus parents à notre tour ? Avons-nous à ce point, oublié notre adolescence pour ne pas savoir comment accompagner son enfant à traverser cette période de développement… ? Réponse avec cette lettre imaginaire mais précieuse. Un grand merci à Gretchen Schmelzer


Parent, c’est la lettre que j’aimerais pouvoir t’écrire. 

Ce combat dans lequel nous sommes en ce moment, j’en ai besoin. J’ai besoin de ce combat. Je ne peux pas te le dire car comment te le dire et cela n’aurait aucun sens de toute façon. Mais j’ai besoin de ce combat

J’ai besoin de te détester maintenant et j’ai besoin que tu survives à ce besoin. J’ai besoin que tu survives au fait que tu me détestes aussi parfois dans cette période que je traverse. J’ai besoin de ce combat même si je le déteste. Peu importe le sujet de cette dispute : l’heure du coucher, les devoirs, la lessive, ma chambre en désordre, mes sorties, mes ami(e)s, ceux que tu trouves biens et les autres. Cela n’a pas d’importance. J’ai besoin de te combattre et j’ai besoin que tu me résistes !

J’ai désespérément besoin que tu tiennes fermement le bout de ma corde pendant que je me débat à l’autre bout à trouver mes repères dans ce nouveau monde dans lequel j’ai l’impression d’être. Avant, je savais qui j’étais, qui tu étais, qui nous étions. Mais pour l’instant je ne le sais pas. Je ne le sais plus. En ce moment, je cherche mes limites et je ne peux parfois les trouver que lorsque je me confronte, m’oppose à toi. Lorsque je pousse tout ce que je connais dans ses derniers retranchements. J’ai l’impression alors d’exister et je peux respirer. Je sais que tu appréciais l’enfant doux que j’étais et que tu te demandes actuellement, “mais où est passé cet enfant ?”. Je le sais parce que j’ai aussi envie de ce gamin. Et à ce moment précis, je souffre de ne pas le trouver.

J’ai besoin de ce combat. J’ai besoin de voir que peu importe à quel point mes sentiments sont mauvais, ils ne nous détruiront ni toi, ni moi. J’ai besoin que tu m’aimes. Avoir l’assurance de ton amour aux pires moments de mon adolescence. J’ai besoin que tu t’aimes quand je parais ne pas t’aimer. J’ai besoin que tu m’aimes pour nous deux. Je sais que ça craint d’être détesté et étiqueté comme “le méchant”. Je ressens la même chose à l’intérieur, mais j’ai besoin que tu le tolères. Dans ce moment particulier, tu peux demander de l’aide et parler de moi à mon insu, ça me va. Mais je t’en prie, parent ne m’abandonne pas car j’ai besoin de toi.

C’est le combat qui m’apprendra que mon ombre n’est pas plus grande que ma lumière. C’est le combat qui m’apprendra que les mauvais sentiments ne signifient pas la fin d’une relation. C’est le combat qui m’apprendra à m’écouter, même si ce combat risque de décevoir, vous et les autres. 

Et ce combat particulier prendra fin. Comme toute tempête, elle soufflera. Et j’oublierai et tu oublieras. Et puis ça reviendra. Et j’aurai besoin que vous vous accrochiez à nouveau à la corde. J’en aurai besoin encore et encore pendant des années.

Je sais qu’il n’y a rien de fondamentalement satisfaisant dans ce travail pour toi. Je sais d’avance que je ne t’en remercierai probablement jamais ni même ne reconnaîtrai ton rôle dans cette période. En fait, je vais probablement te critiquer pour tout ce travail acharné que tu feras. Il semblera que rien ne sera suffisant. Et pourtant, je compte entièrement sur ta capacité à rester dans ce combat. Peu importe combien je discute. Peu importe combien je boude. Peu importe à quel point je suis silencieux ou même colérique. Mais surtout, accroche-toi à l’autre bout de la corde. Et saches que tu fais le travail le plus important que quiconque puisse faire pour moi en ce moment.

Avec amour, ton adolescent

Gretchen Schmelzer est une psychologue américaine. Afin d’expliquer aux parents ce que leurs enfants ressentent, elle a imaginé cette lettre.

Les nouveaux dossiers thérapeutiques: @33. À murmurer…

Si votre relation avec votre enfant vous préoccupe, voici un texte qui pourrait bien participer à détendre l’atmosphère. À méditer… 

À murmurer aux oreilles des enfants: “Tu es capable, tu peux le faire, tu as les ressources en toi pour réussir, tu as le droit d’échouer, tu as le droit de faire des erreurs, tu as le droit de ne pas être parfait & JE T’AIME”